3 septembre 2007

2007: une année record!
La saison 2007 s'est avérée particulièrement frustrante pour l'équipe du MICS. Le vent, la pluie et le brouillard nous ont empêchés de sortir en mer à plusieurs reprises. Encore plus frustrante quand nous considérons que l'année 2007 sera probablement notre meilleure année par rapport au nombre d'individus photo-identifiés ainsi qu’au nombre de baleineaux observés! Nous avons identifié plus de 200 (peut-être même 300!) Rorquals communs différents et nous approchons la centaine de Rorquals à bosse. En ce qui concerne les baleineaux, nous avons identifié 15 jeunes Rorquals communs et 14 "baleineaux" à bosse! En 2006, nous avions répertorié 79 bosses pour les régions de Mingan et de la Gaspésie et en 2005, nous avions identifié 25 baleineaux Rorqual à bosse et commun. De plus, nous avons pu observer tous ces individus malgré un nombre restreint de sorties en mer. À pareil date en 2006, nous avions effectué 67 sorties en mer comparativement à seulement 47 jusqu’à maintenant en 2007! Les autres difficultés relatives à la saison 2007 incluent les distances importantes parcourues par les animaux (voir les nouvelles précédentes) et le déplacement continuel des grandes concentrations de rorquals d'une semaine à l'autre.

Une journée mémorable.
Même si les vents forts nous ont forcés à écourter plusieurs sortie en mer, nous avons eu quelques journées qui en auront valu la peine. Vendredi dernier, le 31 août, a été une journée mémorable! Après trois heures passées à sillonner la limite sud-ouest de notre aire d'étude, nous avons aperçu les premiers souffles sur l’horizon. Deux bateaux du MICS ont pu finalement travailler dans de bonnes conditions météorologiques, sur une mer calme et avec une bonne lumière (des conditions rares en 2007!). Les deux embarcations ont pu couvrir les quelque 25 Rorquals communs qui étaient présents dans la zone. Parmi les grands rorquals, des douzaines de Marsouins communs sortaient dans tous les sens et un Rorqual à bosse solitaire, Stalagmite (H472), se reposait à la surface et semblait jouer avec des algues. Une fois toutes les baleines identifiées, les deux bateaux se sont séparés et ont trouvé d'autres Rorquals à bosse plus à l'Est et au Sud. Les personnes à bord de Twister auraient été contentes de leur journée si elle s’était terminée là… Ce ne fut pas le cas!


Des Dauphins à flancs blancs (Lagenorhynchus acutus)

Au loin, des éclaboussures ont attiré l'attention des gens à bord. Ce qui semblait être des nageoires de Rorqual à bosse qui frappaient la surface de l'eau étaient en vérité des Dauphins à flancs blancs qui sautaient hors de l'eau! Un groupe d'environ une centaine de dauphins s'alimentaient dans les parages. Quelques-uns d'entres eux montraient des signes de curiosité envers le bateau et venaient tourner autour ou suivait son sillon. Puisqu'il ne restait que quelques heures avant le coucher du soleil et qu'un brouillard épais s'approchait, les membres d’équipe à bord de Twister, Frédéric Paquet et Limoilou Renaud, décidèrent qu'il était temps de rentrer au port. Alors qu'ils s'éloignaient des dauphins, une énorme nageoire dorsale est sortie de l'eau à côté de l'embarcation. Les deux membres d'équipe furent soudainement remplis d'un mélange de surprise, d'incompréhension et d'excitation en réalisant ce qu'ils venaient de voir: un Orque-Épaulard!

Ceci est la première observation d'épaulard depuis 1999 pour la portion nord-ouest du Golfe St-Laurent. De 1985 à 1999, un groupe d'Orques-Épaulards nomades (le groupe Jacknife) fréquentait régulièrement les eaux de la Côte-Nord. Jacknife, Jessie, Javelot et Junior étaient devenus quasi-légendaires au MICS après avoir été vus à quelques reprises s'attaquant à des Petits Rorquals. La légende s'est accrue depuis que Jacknife, le gros mâle du groupe avec sa nageoire dorsale caractéristique, sertie d'une échancrure très particulière, fut observé pour la dernière fois, seul, au large de l'Île d'Anticosti en 1999. Nous ne savons toujours pas ce qui pourrait avoir causé la disparition des orques de l'ouest du golfe. Une des causes possibles serait l'accumulation probable de produits toxiques dans le gras de cette espèce qui se trouve au sommet de la chaîne alimentaire. Les photos prises la semaine dernière devraient nous permettre de comparer l'orque observé dans notre zone de recherche avec d'autres catalogue s de l'Atlantique Nord-Ouest pour savoir s'il a déjà été répertorié. En plus des encoches et la forme de la nageoire dorsale, le trait caractéristique permettant la distinction entre les individus chez cette espèce, la selle, se trouve à la base de la dorsale.

Le jeune mâle a suivi Twister pendant plus de 30 minutes alors que le brouillard s'installait autour d'eux. Il s'approchait du bateau en présentant le côté ventral de son corps et tapait la surface de l'eau avec sa queue ou nageait sous le bateau. C'est avec un peu de regret et surtout en voyant l'heure qui se faisait tardive que les membres de l’équipe ont décidé finalement de partir. Le retour à Rivière-au-Tonnerre, dans le brouillard et la bruine, a pris un peu plus de deux heures et il faisait déjà nuit quand les passagers mirent pied à terre. Nous n'avons pas eu l'opportunité de retourner à l'endroit où nous avons vu l'épaulard et il n'a pas été revu depuis. Même si nous ne le reverrons peut-être jamais, il nous aura laissé avec une journée mémorable… et une légende qui persiste!


La grande nageoire dorsale d'un Orque-Épaulard qui sort du brouillard.